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Sans vouloir me méler de leurs affaires
Parmi les tâches dont j’étais chargé dans mon rôle de Volontaire lors de ces JO, il y avait le contrôle des tenues des athlètes mais aussi le contenu de leurs sacs et effets personnels lors de leur entrée en chambre d’appel puis du terrain de jeux.
Outre le fait qu’il faille s’assurer que leur équipement soit conforme aux règles CIO de la compétition, il faut vérifier qu’ils ne portent pas d’objets dangereux ou interdits et surtout, que ne soient pas apparentes des marques non partenaires ces JO.
Cette petite demi-heure qui précède la compétition est un moment que chaque athlète occupe de façon particulière.
Voici quelques souvenirs de ces moments de contrôle et d’observation qui me viennent à l’esprit.
Coté concentration, j’aurai remarqué Rénelle Lamotte, athlète française très présente sur les réseaux sociaux mais complètement renfermée sur elle-même en chambre d’appel ; pas de sac, dossard déjà accroché, aucun mot à quiconque, et un rituel : répéter les gestes de sa future course, comme pour mieux les visualiser, puis fixer quelques secondes chacune de ses adversaires.
J’aurai également constaté l’attitude les athlètes américaines : toujours des hugs chaleureux entre compatriotes, puis rapidement, elles entrent dans une concentration absolue assez remarquable.
Evidemment, l’anxiété et le stress de certaines sont très visibles : ici telle athlète demande à aller 4 fois aux toilettes en peu de temps, telle autre tapote nerveusement ses ongles imposants sur le rebord de sa chaise ce qui accentue l’intensité du moment jusqu’à entraîner quasiment toutes les athlètes à en faire de même… L’effet de ce « concert » improvisé aura été d’ajouter un sérieux coup de pression au juge et au volontaire présents !…
Le téléphone portable devient objet de stress… Il est interdit dès l’entrée des athlètes en 1ere chambre d’appel. Les contrôles sont donc multiples, ce qui donne lieu à des scènes étonnantes. Par exemple, avec ce lanceur polonais, passé à travers tous les contrôles, mais qui au moment d’entrer sur le terrain, se débarrasse de son téléphone caché dans son caleçon en me le donnant tout allumé… Ou comme cette athlète qui m’assure de façon véhémente avoir un téléphone dans son sac. J’ai pourtant fouillé plusieurs fois au milieu des culottes, des brassières et autres objets personnels. Je n’ai rien trouvé. Passablement enervée, elle me demande de le fouiller à nouveau de fond en comble… Un peu gêné je lui suggère de regarder dans sa combinaison... Bingo, l’objet est là.
Parfois, l’atmosphère semblait plus légère et le contrôle des sacs a entraîné quelques moments assez cocasses : une athlète africaine s’élançait dans l’explication du pourquoi de chaque gri-gri qu’elle avait dans son sac. Et elle en possédait plusieurs dizaines ! Je fus obligé de l’interrompre en lui disant « So, do the best you can » ce qu’elle approuva d’un pouce levé très décidé.
Régulièrement, je trouvais aussi dans les sacs un nécessaire de maquillage servant à peaufiner le look avant d’entrer sur le stade ou bien à camoufler d’éventuelles marques de bronzage ou de pointes sur les jambes. C’est ainsi que devant le grand miroir de la chambre d’appel, pendant quelques minutes, c’était la loge des artistes.
Je me remémore aussi le souvenir de cette athlète des Caraïbes sortant une à une de son sac, 8 chaussures toutes différentes pour le contrôle ! Très sérieusement qu’elle me dit qu’elle n’en utiliserait que 2. J’ai eu du mal à me retenir de rire en lui répondant « Sure. Of course. One for each foot. ».
Plus touchant, je n’oublierai pas cette coureuse de demi-fond, assise à quelques centimètres de moi. Elle déplia un long courrier dont la calligraphie semblait dater d’un autre temps. Elle le relisait tout bas. Ça semblait être important pour elle. Je voyais ses lèvres trembler et ses yeux pleins d’émotion.
J’ai détourné le regard, c’était un moment privé. Je la laissais seule avec sa lettre, dans son moment.
Chacun vit de manière intense à sa façon l’instant qui précède l’entrée en compétition.
Un moment de vérité. Comme un aboutissement. Quatre ans ou plus d’entraînement, de sacrifices. Sans doute le moment d’une vie.
D’ailleurs, l’organisateur l’a bien compris puisque maintenant, les entrées des athlètes sont théatralisées.
Mais dans les quelques minutes préalables, dans cette pièce un peu secrète où l’odeur de camphre domine, j’ai le sentiment pregnant d’avoir eu le privilège de découvrir l’humanité du sport professionnel.
Juste avant que les lumières et les cris du public n’en fassent un spectacle.
Christophe Mouton
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